Quand j’étais funambule… voilà une histoire que je raconte très souvent en atelier, tant cette expérience sensorielle eut d’impact sur ma perception du monde, inspira ma vie et ma pratique professionnelle.
Perchée sur la plateforme de départ, dont est tendu ce câble étroit au dessus du vide, je fais face à ma destination, 8 mètres environ… je calme ma respiration, ajuste mon regard, fébrile, je vacille à l’intérieur de moi : l’ombre de la chute plane.
Annie Fratellini m’invective et me dit « Appuies-toi sur l’air ! »
Jamais une phrase n’aura tant bouleversé mon esprit et répondu à mon corps… car en effet, dans cet équilibre instable, dans cette quête de verticalité souple, quand les muscles développent la tension et la finesse suffisante, que l’esprit s’allège lui aussi, que nos os sont tels ceux des oiseaux, la légèreté nous envahit, et l’air se densifie, l’air devient matière, l’invisible devient palpable, l’inconnu devient familier car l’autre fil, celui qui nous relie du Ciel à la Terre est là, à travers notre cœur, il s’anime, et la confiance en soi prend le pas sur la peur de tomber, la sensation d’être pleinement connecté à soi permet d’avancer vers l’autre… alors j’ai traversé, dansé, mes sens renversés, la grâce de l’évidence qui m’a traversée s’est ancré en moi définitivement.
Quand le subtil conjugue la matière, que la tension conduit à la paix, le silence à la présence, le vertical à l’horizontal, que le cœur carrefour des énergies palpite et que l’instant tutoie l’éternité.
Cette expérience traduite en atelier nourrit la conjugaison que j’essaie d’éveiller : celle de la rencontre à Soi et au Monde, du Sens comme Direction, pour agir ce que l’on est, Walk your talk, encore…